La dissertation philosophique (cas pratique) - Savoir-faire

 

Cas pratique :

Exemple 1 : Y a-t-il encore intérêt à philosopher ?

C'est un sujet dialectique qui se présente sous la forme d'une question ouverte
 
$\blacktriangleright\ \ $ Le travail consiste tout d'abord à analyser la question explicite. Pour se faire, il faut adopter une démarche qui vise à trouver la raison d'être de la question. Il s'agit de se demander d'une part : qu'est ce qui justifie cette question ? En quoi la question mérite d'être posée ? Partant de cette première analyse, trois faits peuvent être répertoriés séparément ou conjointement :
 
$-\ $ Un monde qui devient de plus en plus matérialiste. A cela  s'ajoute une suprématie de la praxis sur la théorie.
 
$-\ $ Une évolution ou une mutation des différentes activités de l'homme alors que la philosophie semble rester en léthargie ou réduite au silence.
 
$-\ $ Une commune condamnation de la philosophie par le sens commun, les scientistes et les technocrates qui assimilent la philosophie à une simple spéculation ou  un discours sophistiqué.
 
D'autre part il faut  trouver des questions que le sujet implique afin de poser le problème philosophique. Partant de cette deuxième préoccupation. Ce sujet soulève la question du sens, du rôle (la fonction) et surtout de l'utilité de la philosophie par rapport à une époque. Le terme encore  implique que même en admettant que la philosophie avait un intérêt, la question  qui se pose est : garde-t-elle toujours le même intérêt ? Cette nouvelle implication soulève d'autres questions comme la raison d'être et  le statut de la philosophie dans la vie. Notons bien que c'est cet ensemble de questionnement qui produit la problématique. Pour préparer le développement afin d'annoncer un plan, il faut analyser un des termes clefs du sujet à savoir « intérêt ». De là intervient la nécessité de conceptualiser les termes  du sujet. Ainsi « Intérêt » peut être compris dans un premier sens comme le profit, un gain ou d'un bénéfice. Mais surtout il ne faut pas se limiter à cette première compréhension car il prend un sens plus profond d' « avantage » ou d' « importance » c'est-à-dire digne d'attention (propre à captiver). C'est en ce moment qu'une autre série de question mérite d'être soulevée. La question est : A partir de quelles idées discutables la question pourrait se constituer ? L'on voit alors que deux parties se dégagent : une thèse et une antithèse. Ainsi se dégagent des idées maîtresses et transversales à savoir de la caducité ou de l'inutilité ainsi que de l'importance ou même de la nécessité de philosopher. Ce plan annoncé nous guidera aussi bien dans la thèse que dans l'antithèse.
 
$\blacktriangleright\ \ $ Le développement : le schéma est d'avancer une idée et de l'argumenter pour finir par une illustration. Toutefois l'illustration n'est pas obligatoire mais elle donne toute de même à votre dissertation une haute valeur philosophique et scientifique. En effet nous savons qu'on illustre par des exemples et des citations. La citation témoigne de la connaissance que nous avons des auteurs et de leurs doctrines. Quant aux exemples, ils montrent notre culture intellectuelle d'une manière générale.
 
La thèse : elle argumente pour affirmer ou infirmer une proposition. 
 
$\centerdot\ \ $ La philosophie est inutile et par conséquent elle est, de nos jours, sans intérêt. En effet face aux multiples problèmes de la vie, la philosophie continue de rester dans la contemplation ou dans des questionnements au risque même de plonger l'homme dans l'inhibition. Jugée avec ce critère de résolution des problèmes d'ordre pratique, la philosophie, en tant que simple activité théorique, perd de plus en plus sa valeur et finit par devenir sans intérêt. C'est dans cette dynamique que. Pierre Fougeyrollas écrit « Jugée avec les critères des techniques et des sciences, la philosophie apparait comme inutile. Elle est en effet plus et autre qu'un art de vivre, qu'un aménagement de l'existence, que la visée d'un but dont pourrait se justifier du point de vue de l'utilité »
 
$\centerdot\ \ $ De plus, la philosophie est détrônée de sa capacité d'expliquer rationnellement la réalité. En effet attachée à ses questions fondamentales du sens et des valeurs, la philosophie est foncièrement métaphysique ou morale. Or partant du positivisme, Auguste Comte décrit une évolution irréversible de l'esprit humain en trois phases que sont l'étape théologique, l'étape métaphysique et l'étape positive ou scientifique. Ainsi chaque mode d'explication est révolu selon un principe de disqualification posé par l'étape suivante. Dans cette dynamique, force est de reconnaitre que la philosophie, après avoir joué un rôle utile par le passé, ne peut plus servir dans l'ordre actuel où on cherche à prévoir et à agir avec efficacité.

N.B : 

D'autres idées peuvent être avancées ici. Mais nous nous limiterons à ces deux idées pour montrer leur argumentaire  ou tracer le schéma d'une dissertation
 
L'antithèse : elle est obligatoire pour un sujet dialectique  de ce type. De plus elle doit être en rapport avec la thèse, en apportant des contre arguments ou des restrictions. Ainsi deux possibilités qui ne s'excluent pas s'offrent : il s'agit d'apporter des restrictions à certaines idées de la thèse ou de convoquer d'autres auteurs pour montrer qu'il est toujours important de philosopher. On adoptera ici cette dernière option pour montrer que, malgré tout, il y a toujours intérêt à philosopher. 
 
$\centerdot\ \ $ Reprendre la question de départ consiste à nous demander que gagnons-nous à philosopher indépendamment de toute comparaison. En réalité la philosophie est un guide de la vie dans la mesure où elle active notre raison et nous dote d'un esprit critique. En effet, étant essentiellement analyse et questionnement, la philosophie constitue un gade fou pour ne pas tomber dans la sclérose de la pensée. En nous interdisant d'avoir des idées fixes tirées  de l'opinion sans aucune participation de la raison, la philosophie est digne d'intérêt ; elle est même nécessaire à la vie humaine. Pour souligner cet importance Descartes écrit : « Or c'est proprement avoir les yeux fermés, sans tâcher jamais de les ouvrir, que de vivre sans philosopher (...) cette étude est plus nécessaire pour régler nos mœurs et nous conduire en cette vie... »
 
$\centerdot\ \ $ L'intérêt et l'utilité d'une activité doit être jaugés par rapport à un objectif. Une fois l'objectif fixé, l'intérêt se juge en rapport avec le moyen ou avec ce qui sert de l'atteindre. Ainsi l'objectif de l'homme est, non pas de se contenter d'une vie animale, mais surtout de se rendre meilleur par l'acquisition des connaissances. Or la définition première de la philosophie est la recherche du savoir. Donc la philosophie est doublement intéressante car c'est elle qui nous pousse vers la connaissance d'une part et d'autre part c'est elle aussi qui nous libère du poids des préjugés et des opinions sans fondement rationnel. Cette fonction libératrice de la philosophie est soulignée par Bertrand Russell lorsqu'il écrit : « La philosophie bien qu'elle ne soit pas capable de nous donner avec certitude la réponse aux doutes qui nous assiègent, peut tout de même suggérer des possibilités qui élargissent le champ de notre pensée et délivre celle-ci de la tyrannie habituelle. »
 
La synthèse : elle essaie de surmonter une contradiction apparente entre thèse et antithèse.
 
$\centerdot\ \ $ L'intérêt de la philosophie ne se poserait pas un doute si le fait de  vouloir tout mesurer à travers l'altérité n'était une manie chez l'homme. C'est pour dire que la philosophie, considérée en elle-même, revêt un intérêt à plus d'un titre. En effet, même si elle n'intervient pas dans l'amélioration des conditions de vie humaine au même titre que la science et la technique, la philosophie constitue le garde-fou pour ne pas tomber dans leurs dérives 
 
$\centerdot\ \ $ Il faut aussi noter qu'une utilité n'est pas seulement pratique ou matérielle, elle est aussi d'ordre qualitatif ; de ce point de vue, on ne peut pas la réduire à un seul angle. C'est dans ce sens alors que la philosophie a bel et bien un rôle à jouer : celui de rendre humain l'homme. Nous comprenons humain, de manière générale, par l'usage intensif de tout ce qui distingue l'homme de l'animal ; de ce qui fait son essence.
 
$\blacktriangleright\ \ $ Pour conclure, il faut apporter sa ferme position en résumant le développement pour ouvrir une nouvelle perspective.
 
De ce qui ressort du développement, on peut affirmer qu'il y a plus qu'un intérêt mais une nécessité de philosopher car l'homme est multidimensionnel ; et la science ou la technique auxquelles elle est comparée ne satisfont qu'une partie des besoins de l'homme.
 
De plus tout homme aspire au bonheur quel que soit l'appréhension qu'on en a faite. Ce bonheur correspond à un calme de l'âme ; c'est dire que  dans le bonheur, l'individu n'est perturbé ni par aucun désir, ni aucune aspiration, encore moins une tension. La philosophie apparait alors comme le moyen d'exercer le jugement libre de telle sorte qu'elle annihile tous les obstacles des chemins qui conduisent au bonheur. C'est dans ce sens qu'Alain, tout en définissant la philosophie, lui accorde sa capacité de réduire ces obstacles de tout bord. Il écrit alors que la philosophie « C'est, aux yeux de chacun, une évaluation exacte des biens et des maux ayant pour effet de régler les désirs, les ambitions, les craintes et les regrets ». Mais la question qui se pose est de savoir si le fait  d'endosser ce simple rôle de réglage des désirs est efficace. Autrement dit la philosophie a-t-elle une voix suffisamment audible pour faire entendre son cri d'alarme ? N'a-t-elle pas mieux à faire que de garder le silence si, malgré son importance, elle n'est guère écoutée ou appréciée à sa juste valeur ? De telles questions méritent aussi d'être examinées.
 
Auteur: 
Khady Mbaye

Commentaires

Tres bien

Y’a une légère confusion entre la thèse et l’antithèse

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