Les entités politiques nées du déclin du Gaabu - 4e

Classe: 
Quatrième
 
Le Gabou était dès le $XV^{ième}$ siècle l'un des plus puissants royaumes mandingues vassaux du Mali. Il impose sa domination à plusieurs États de la Sénégambie. A son déclin ces derniers s'émancipent et forment de petites entités indépendantes.

I. La dislocation du Gaabou

Le Gaabou exerçait sur certains États de la Sénégambie une influence plus culturelle que politique. Le Gaabu aurait été fondé au $XIII^{ième}$ siècle par Tiramagan Traoré et représente à ses débuts une grande province de l'empire du Mali sous le règne de Soundjata Keïta. A la décadence de l'empire du Mali au $XVI^{iéme}$ siècle, le Gaabu devient indépendant. Il est alors dirigé par la dynastie matrilinéaire des Nyanthio dont le roi était obligatoirement issu des familles paternelles Sané et Mané. Le Gaabu était une confédération de $45$ provinces dont les plus importantes sont Sama, Timara, Pacana, Mana, Sankolla, Bajar... Ces provinces sont habitées par des mandingues, mais certaines comportent une forte proportion de peuls dont l'installation remonte à l'époque de Koli Tenguela. Au $XIV^{ième}$ siècle des rivalités à l'intérieur de la famille Nyanthio entraînent une guerre dont la conséquence fut le départ des Guelewars du Bajar vers le Sine et le Saloum : c'est le début de l'effritement du Gaabu. Mais les causes de la dislocation sont de plusieurs ordres.

1. Les facteurs économiques

Au $XIX^{ième}$ siècle le commerce négrier connaît une chute. Des chefs de provinces (Brasufindé, Somé, Pakao) prennent leur indépendance vis-à-vis du pouvoir central. Les Nienthie et Koring voyant leur pouvoir et revenus disparaître, s'attaquent aux musulmans malinkés et peuls en $1843.$

2. Les facteurs religieux et socioculturels

L'état théocratique du Fouta Djallon encourage la progression de l'islam entre le $18$ et le $XIX^{ième}$ siècle. Les peuls voulant accéder aux comptoirs écartent les intermédiaires mandingues. Ils défendent les frères musulmans (Sarakholés, Malinkés, Torodos) et mettent fin aux exactions de l'aristocratie du Fouta sur les peuls. Les facteurs extrêmes : les français s'installent entre $1896$ et $1950$ et introduisent l'arachide et le coton et contrôlent certains villages. Miné par la crise et la progression de l'islam au $XIX^{ième}$ siècle, le Gabou s'affaiblit sous les attaques peulhes en $1845$, l'almamy Omar détruit la capitale Kansala. L'empire s'effondre sous l'attaque peulh dirigé par Alpha Molo et Moussa Molo Baldé.

II. Les nouvelles entités politiques

Trois entités principales vont naître de la dislocation du Gabou.

1. Le territoire de Fodé Kaba

Né vers $1818$ près de Bakel. Son objectif était de convertir les infidèles à l'islam. Il attaque Bassé, puis le Balantécounda en $1876$ ensuite le Kabada où il combat avec les peuls d'Alpha Molo. Il est tué dans le Fogny.

2. Le Fouladou d'Alpha Molo Baldé

Alpha Molo a reçu une solide éducation islamique auprès de l'Almamy Alpha Yaya. Il fut l'âme de la résistance peule contre les exactions des Mandingues et le fondateur du royaume. Il établit sa capitale à Ndorma. Son fils Mansa prit le pouvoir et s'allie aux français ce qui facilite leur pénétration.

3. Le sine de Meissa Waly Mané

Des nobles, mécontents de leur exclusion du pouvoir au Gaabu, sous la conduite de Meissa Waly Dione s'emparent du pouvoir et établissent leur capitale à Mbissel ; ils fondent la dynastie des Guelewars et vont définitivement s'installer à Diakhao. Le Saloum sera fondé à la même époque et tous les royaumes au nord de la Gambie vont s'émanciper : Niomi, Badibu, Wouli.

4. Le pays Diola

C'est le Fogny. La population en majorité diola, est aussi composée de bainouks. La société est égalitaire et l’économie est dominée par la « civilisation du riz ».
L'organisation politique est marquée par l'absence de structures étatiques. Vers la basse Casamance, le royaume vassal des Bainuk-Kasanga gardera son identité jusqu'à sa destruction par les Balante en $1830.$ C'est du titre de son roi (Kasa mansa) que les Portugais allaient tirer le nom qu'ils donneront à la rivière (Casamance).
 
Le Gaabou a connu une histoire mouvementée. Les différentes entités nées de son déclin seront réparties entre plusieurs états ce qui va faciliter la pénétration coloniale.

Supports de cours

Le Gaabu : ses entités et les causes de sa dislocation

Le Gaabu est entouré d'un cortège d'États vassaux parfois peuplés de non-Manden acculturés, comme les Kokoli (Tyapi), Beafada et Kasanga (Bainunk de l'Est) ou comme le royaume de Bras (Oio, sur le Rio Cocheu) ou la série de royaumes gambiens que les Portugais trouveront au $XV^{ième}$ siècle, de l'embouchure en amont : Nyumi, Bati (Badibu), Nyaani, Wuli. Les Balante (ou Balanta), hostiles à tout pouvoir central, se tiennent à l'écart et ne sont que partiellement soumis. Si la langue et la culture manden dominent et fleurissent jusqu'à nos jours, le système politique qui s'organise est largement autonome par rapport au centre du Haut-Niger. Fait remarquable, sous l'influence des autochtones, l'aristocratie du Gaabu adopte un système de succession matrilinéaire. C'est d'elle que tire son origine le lignage des Gelowa, qui ira organiser les royaumes seereer à une date incertaine, mais certainement antérieure à l'arrivée des Portugais en $1446.$ Vers la basse Casamance, le royaume vassal des Bainuk-Kasanga gardera son identité jusqu'à sa destruction par les Balante en $1830.$ C'est du titre de son roi (Kasa mansa) que les Portugais allaient tirer le nom qu'ils donneront à la rivière (Casamance). L'événement majeur pour ces Maninka de l'Ouest sera évidemment l'arrivée des Portugais qui s'effectue entre $1446$ (découverte de la Gambie) et $1456$ (découverte du Rio Grande).
 
Désormais, l'océan devient le principal front d'acculturation et sa signification pour l'empire du Mali se transforme complètement. La Gambie, remarquablement navigable, va rester, jusqu'au $XIX^{ième}$ siècle, l'une des principales voies d'accès vers l'intérieur du continent. C'est par là que sort désormais l'or du Banbugu et même du Bure, puis bientôt des esclaves en nombre appréciable. C'est par là que, dès la fin du $XV^{ième}$ siècle, passent la plupart des missions portugaises se rendant auprès de l'empereur du Mali $($entre $1484$ et $1495$, en $1497$, en $1534).$ Dès la fin du $XV^{ième}$ siècle, une alliance est esquissée contre les Denianke de Tengella. La menace s'éloignera, les Denianke s'étant fixés dans le Fouta-Toro. Cependant, la consolidation du royaume seereer du Saalum, au début du $XVII^{ième}$ siècle, fera passer sous son autorité des États maninka du nord de la Gambie, du Nyumi au Nyaani. Ils vivront ensuite jusqu'au $XVIII^{ième}$ siècle au rythme de la traite esclavagiste. Le Gaabu ne maintiendra plus son autorité qu'au sud du fleuve (Kantora) et s'efforcera de communiquer directement avec les Portugais, plus au sud, par le Rio Cocheu et le Rio Grande. Tout prouve cependant qu'en dépit des épreuves du $XVI^{ième}$ siècle il restera pourtant fidèle à l'empire du Mali diminué, amputé de ses dépendances sahéliennes, mais toujours vivant, contrairement à ce qu'on a longtemps affirmé. On peut sans doute préciser la date où a pris fin cette liaison historique. Des recoupements sérieux portent à croire que le Banbugu, avec ses mines d'or, est resté dans la dépendance du Mali jusqu'en $1599$, date de l'échec final de Mansa Mamudu devant Djenné. Il a alors été conquis (pour le compte des Denianke du Fouta-Toro qui constituent à l'époque l'empire du Grand Ful) par des renégats portugais, recrutés par le fameux Ganagoga, juif de Crato converti à l'islam et gendre du silatigi roi des Denianke 7. Depuis cette date, vers $1600$, toute communication devient impossible entre le Gaabu et le Haut-Niger, et le Mali va achever de se disloquer dans le quart de siècle suivant 8. Plus au sud, l'arrière-pays des Sapes était occupé par l'immense massif gréseux du Fouta-Djalon dont les larges plateaux, coupés de profondes vallées, sont infertiles mais propices à l'élevage en raison de leur climat. Depuis une époque non encore déterminée, ce pays est le domaine de deux peuples étroitement apparentés : les Jalonke et les Sosoe (ou Susu), parlant des dialectes d'une même langue, le manden, très proche du maninka mais cependant distincte de celui-ci. 
 
       Yves Person, Les États ou provinces manden de la côte, in Histoire générale de l'Afrique, vol4
          L'Afrique du $XVI^{ième}$ au $XVIII^{ième}$ siècle, chapitre 12 Pp 340 pdf.
 
Auteur: 
Penda Dieye

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